Tout édifice fabriqué par l'homme et au service de celui-ci est digne d'intérêt. Des châteaux d'eau, monuments indissociables des civilisations techniquement avancées depuis l'époque romaine, en passant par les gares, omniprésentes depuis l'avènement du chemin de fer, ces constructions sont un héritage technique et culturel qui, sans provocation, méritent d'être mises sur un pieds d'égalité avec les monuments dits « historiques », lorsqu'il s'agit d'évoquer la mémoire.
Ainsi, notre patrimoine industriel témoigne d'une époque, certes, mais aussi de l'histoire des hommes et des femmes qui, à un moment ou un autre ont laissé en ces lieux une empreinte, une trace, une ombre, un reflet.
Pastel sec, 44 x 65 cm, 2010
Je sais qu'un train s'y arrête, plusieurs fois par jour. Pour un village de moins de 1500 habitants c'est une chance. J'entre à l'intérieur de la gare et découvre un guichet fermé, définitivement semble-t-il. Les vitres sont brisées, le panneau des horaires est vide, une chaise traîne ...
J'imagine pourtant ce lieu, un jour de frénésie, le chef de gare appelle les retardataires à se dépêcher de monter en voiture, l'ombre d'un voyageur pressé apparaît alors, subrepticement, puis s'évapore.
Pastel sec, 44 x 65 cm, 2010
Au volant de ma voiture, alors que le village où je vis est encore distant de plusieurs km, seul cet édifice blanc et rouge pointe le bout de son nez et culmine à l'horizon, les clochers des églises étant cachés par les arbres. Je le croise ainsi chaque matin, et le retrouve chaque soir, c'est mon repère, mon phare.
Evidement il n'est pas fait de matériaux "nobles", de pierres de taille, mais plus probablement de béton et de métal. Faut-il pour autant ne pas le voir ? Cette construction, au principe simple des vases communiquants et indispensable à notre vie, gagnera-t-elle un jour le statut de monument historique, comme aqueducs et moulins qui se voulaient initialement fonctionnels ?
Pastel sec, 44 x 65 cm, 2010
En m'approchant du bord, j'observe le fond bâti en pierre. Il est envahi par la végétation. C'est assez étrange, l'eau est si transparente... C'est aujourd'hui un endroit très calme, reposant.
On dit que les lavandières étaient surnommées "les poules d'iau". Je suppose que c'est la silhouette de l'une d'elles qui se reflète à la surface de l'eau. Vous la voyez ? Non ? Ah, vous me faites douter ! Pourtant je jurerais la voir, la tête en bas...